La langue est vivante, toujours bête face à l’homme du risque. Toussotements, hoquets, halètements. Je ne crois pas à la magie. On érige des barrières, de plus en plus de barrières autour de parcelles de certitudes. Chacune les siennes. Toussotements. L’homme sans étiquette : le citoyen, c’est fini. Hoquets. Tu choisiras ton camp. Onzième commandement. Ou l’on choisira pour toi. Tais-toi. La langue est vivante mais tu n’as pas le droit à la parole. Un droit n’est reconnu que s’il y a un autre qui se sent obligé de le respecter. Sinon, c’est quoi ? Halètements. La haine revient quand l’homme s’ennuie et ne veut plus rien apprendre. Une haine vantarde et prétentieuse. Imperceptiblement, les mots de Primo Levi s’effacent. Toussotements. Regards fuyants. Fuites. Ce monde est devenu hautement viral, toxique et la biologie n’en est aucunement responsable. La gêne, ce ne sont pas les gênes. Tous les individus de la population sont identiques, à l’exception de quelques rares mutants, a écrit François Jacob. Ce sont toujours les idées, les idées noires, humaines et ambitieuses, qui sèment la zizanie. Bouillons. Bouillonnements. Brouilles. Brouillons. Nous sommes brouillons bruyants.
Et puis, du jour au lendemain, je me suis mis à écrire tous les jours, au début, les lignes ressemblaient à de grandes tâches d’encre noire puis, au fil des jours, les lignes et les traits se sont étirées, des lettres sont sorties de ces sédiments initiaux, des mots ont commencé à se dessiner, mes yeux, à se dessiller. » Est-ce le mot, ma fille, ou la chose qui vous fait peur ? » rappelle Molière. Ce monde qui vit la plupart du temps dans l’imaginaire peine à se regarder dans un miroir, préférant la facilité des injonctions.
Flânerie Quotidienne 